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Gare à l'eau qui dort n° 18 - Filature
GARE A L'EAU QUI DORT N°18
FILATURE
DORIAN détective privé, ami d'enfance de Louise
Musique d'ambiance (Nestor Burma)
Elle acquiesça de la tête.... Il l'aida à se relever et, brusquement, l'attira contre lui en la serrant avec force, l'emprisonnant de ses bras protecteurs... Curieusement, cette femme quelque peu distante habituellement se laissa faire et même posa sa tête sur son épaule....Timidement, elle glissa ses bras autour de lui... Ils restèrent enlacés ainsi en silence puis Tom se détacha doucement, ramassa la couverture glissée à terre et la remit dans son sac à dos.... Elle resta immobile, la tête baissée, n'osant plus le regarder. Il voulut reprendre le chemin du retour, mais la tête baissée de Louise lui dit non... Surpris, il l'entraîna par la main vers les profondeurs de la forêt.... (Episode précédent n°17 _ cliquez sur la phrase)
La cible quitta enfin son Agence à une heure tardive. Il faisait déjà sombre.
Une pleine lune se dégageait progressivement des nuées, et répandit ses flots de clarté sur la ville, allumant des reflets changeants sur le verre des buildings.
La voiture banalisée grise de Dorian ronronnait doucement. Il enclencha la première, prêt à démarrer.
Damien s'était affublé d'un imper froissé style Colombo, et d'un chapeau feutre rabattu sur son visage... mais Dorian, qui le filait depuis plusieurs jours, le reconnut immédiatement... Tiens, tiens, tiens... ! L'"amour" est une chose étrange, vaste, complexe qui vous fait faire des trucs énormes.... Le condor éclata silencieusement de rire... Clin d'oeil humoristique du Destin ? N'est pas toujours Colombo qui veut !
Il le laissa prendre quelque distance et .... eut du mal à rouler suffisamment loin de la voiture de Damien, tant celui-ci roulait à une allure insensée....
Ils sortirent de la ville, puis Damien bifurqua soudainement vers une bretelle d'autoroute. Dorian soupira, profondément soulagé. Cette fois, Damien ne prenait pas la route vers son domicile...
Il jubila.... Il le tenait...Le poisson était ferré ! On ne prenait pas tant de précautions pour se rendre chez son dentiste....
Une chance qu'il avait soigneusement veillé à emporter son matériel. Caméra, appareil-photos et ses objectifs, smartphone... et autres se trouvaient à portée de main sur le siège passager.
Peu de monde sur l'autoroute... L'heure tardive ne s'y prêtait guère.. Il espérait que Damien ne prendrait par garde à la voiture grise qui le suivait de loin comme son ombre....
Foutue lune ! On y voyait comme en plein jour !
Pas de panique : Dorian avait installé un "traceur GPS" sur la voiture de Damien, afin de suivre tous ses déplacements à distance. Une balise rouge traçait la route sur le cadran vert du GPS de Dorian.
Pas très réglementaire, mais tellement efficace !
L'adrénaline enflammait ses veines, l'électrisait.... La voiture de Damien slalomait entre les véhicules à une allure folle... Dorian jura et dut mettre le pied au plancher afin de ne pas se laisser distancer....
Ils roulèrent ainsi de concert pendant une bonne demi-heure, puis la voiture de Damien emprunta une bretelle de sortie d'autoroute...
Ils déboulèrent dans une banlieue populaire que Dorian connaissait bien.. C'était un petit village charmant qui dormait le jour et vivait en sourdine la nuit.... Damien se rendait tout droit vers.. le quartier chaud de la banlieue... La voiture de Dorian cahotait sur les rues défoncées...
Le Détective s'arrêta le long d'un trottoir pour suivre la cible par le biais de son GPS... afin de ne pas se faire repérer... Il comprit où se dirigeait Damien.. Dans un parking boisé et crasseux, dans lequel volaient toujours des détritus de toutes sortes.
Dorian passa la première et s'engagea lentement vers un autre accès du parking, lieu nauséabond où traînaient des épaves ou voitures calcinées parmi tous les véhicules des immeubles alentours. Il repéra un espace vide et se glissa entre deux poubelles ambulantes, vieilles carrosseries d'un âge incertain.
Il mit son smartphone dans la poche ventrale de son sweat gris dont il releva la capuche sur sa tête selon la mode d'ici, se chargea de sa caméra miniature et de son appareil photo muni de son objectif qu'il enfourna prestement dans une sacoche en jean avachie... Puis claqua discrètement la porte de son véhicule...
Il se coula furtivement entre les voitures, en scrutant l'obscurité. Personne ! Il se mit à courir d'un pas souple et félin et se jeta brusquement dans l'ombre d'un arbre.
Damien avait traversé la rue déserte et se rendait d'un pas alerte digne d'un jeune homme sportif peu conforme avec sa tenue vieillotte et négligée, vers un porche qui trouait l'immense façade bétonnée d'un immeuble de cinq étages, chichement éclairé par un lampadaire moribond...
Dorian le laissa entrer sous le porche en le mitraillant avec son objectif... Il zoomait en réglant son appareil avec une dextérité qui trahissait son métier et soupira. On reconnaissait à peine la cible, déguisé ainsi ! Damien avait disparu, avalé par la bouche obscure du porche... Dorian traversa rapidement la rue toujours déserte faiblement éclairée, et s'engouffra à son tour sous le porche où s'alignaient une rangée de poubelles puantes qui débordaient.
Il déboucha enfin dans une cour carcérale fort triste remplie d'ombres, entourée d'immenses immeubles bétonnés, désespérants d'uniformité et de laideur, aux façades criblées de petits balcons en béton.... Pas le temps de jouer les touristes.... Il aperçut l'ombre de Damien qui poussait une lourde porte grinçante de l'immeuble de gauche... Merde ! la porte couinait si fort qu'elle devait réveiller tous les immeubles alentours...
La chance lui sourit: un jeune couple aux coiffures de sioux, passablement éméchés et bruyants s'enfilèrent en titubant derrière Damien... Dorian se joignit souplement au couple en les imitant, rabattant sa capuche sur son visage, en laissant retomber la porte en fer avec un bruit d'enfer.... Ils grimpèrent ainsi les marches poussiéreuses en béton, puis les minots, après bien des efforts, enfilèrent une clé à la porte de gauche du palier du deuxième étage.... Dorian continua silencieusement à monter, quand il aperçut soudain Damien sur le palier du troisième qui comportait deux portes, l'une à gauche, l'autre à droite...
Damien lui tournait le dos et attendait devant la porte de droite... La minuterie stoppa brutalement, et ils se retrouvèrent dans le noir... Une veilleuse de secours anémique jetait une ombre jaune sur le palier.... Dorian se rejeta vivement dans l'ombre du palier en dessous, planche de salut intermédiaire entre deuxième et troisième étage.... La porte du troisième s'ouvrit en grand, illuminant Damien... Une toute jeune beauté, magnifique petit animal à longue crinière blonde, manifestement mineure, nue sous les froufrous roses d'un déshabillé entrouvert, accueillit Damien avec gouaille..
"C'est toi, Mylord ? Entre vite, Seb, viens ! Enfin te voilà ! tu en as mis du temps.... C'est triste sans toi...."
Et elle l'entraîna dans un grand rire cristallin vers la lumière éblouissante du couloir de l'appartement en claquant la porte... Il l'entendit minauder en gloussant, comme le font toutes les gamines excitées par la vue des garçons....
Dorian avait assisté à la scène, médusé ! Ce n'était plus une banale histoire d'adultère, mais une scandaleuse "affaire de moeurs" !
Ce genre d'histoire qui risque de vous marquer au fer rouge à vie !!!
Dorian avait pris le temps de filmer le couple discrètement... des photos sans flash risquant de ne rien donner de valable....
Il aura bien du mal à dévoiler la vérité à Louise ! Il se risqua sur le palier, écoutant attentivement.... Les tourtereaux se parlaient à mi-voix... Il comprit qu'ils étaient fort occupés et qu'il prenait de grands risques pour rien...
En redescendant souplement, il se mit à rire silencieusement.... On était loin du dédaigneux et ambitieux Damien, patron tout puissant de l'Agence....
Cet homme difficile, qui ne digérait pas les succès mondains de sa femme, était complètement dépravé !
Une chance que Dorian n'avait pas envoyé ses mouchards motards ... Par égard pour Louise, il avait préféré s'en occuper seul....
Une colère sourde l'envahit brusquement ! Il avait beau fréquenter tous les bars, bordels et bas lieux de l'humanité, pour y glaner des infos... il était scandalisé !
Bon, si Louise désirait faire prendre son mari en flag, il fallait amener le sous-marin et rameuter les troupes... Sans oublier que Damien était un méfiant de naissance... Il ne s'agissait pas de se faire retaper....
Sale boulot !
Il décida de glander dans la rue qui partait à angle droit au coin de l'immeuble, la traversa et se retrouva face aux fenêtres de l'appartement de la Belle... Une de ces ruelles quotidiennes des quartiers chauds, croisement entre ciel et enfer où le passé, le présent et le futur se conjuguaient dans un joyeux et triste désordre.... Sous son apparente indolence de jeune loubard se cachait la vigilance accrue de l'observateur.... Il avisa un troquet vaguement éclairé de rouge, un bouge tendu de rouge et de miroirs pas très net, où minaudaient quelques jeunes beautés violemment peinturlurées, courtes vêtues sur des résilles noires et talons aiguilles, perchées sur des tabourets le long d'un comptoir noir miroitant ... Peu de monde !
Allez, Dorian, au boulot ! Allons glaner quelques bribes... Cet endroit puait le poucave, pour peu qu'on ait les moyens !
Il s'installa sur une chaise en simili cuir rouge derrière une petite table ronde en formica noir, face à l'entrée tout au fond du bouge et attendit.... Ô surprise, non pas une de ces mignonettes, mais un famélique garçon tout de noir vêtu vint à lui, avec un regard torve... Dorian se frotta les mains : c'est dans la poche ! Il sentit qu'il allait palpiter au coeur d'une histoire passionnante, avec ce gamin.... Il activa sa caméra cachée....
Luciole
A suivre
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100 visiteurs et 622 pages lues le 28/0602020
Tags : Roman 1, époux, détective privé, filature, banlieue, adultère, caméra miniature, appareil photos, traceur GPS, mineure superbe, troquet, serveur
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Commentaires
8LavallièreSamedi 4 Juillet 2020 à 11:19Hello chère Luciole, n'oublie de m'avertir quand tu publieras tes écrits. C'est en effet palpitant. Merci pour tes passages et ta fidélité. Quant à moi je ne peux accéder à Eklablog qu'au café car ma connexion me bloque tout les sites Eklablog exclusivement et j'ignore toujours pourquoi. A bientôt
Je continuerai la lecture plus tard, dans quelques minutes je pars dans les Vosges rejoindre toute la petite tribu pour fêter l'nniversaire de Coline 16 ans
à bientôt
Bonne journée
Bises
Un plaisir, ce fut de lire cette suite, Luciole et la suivante n'en sera pas moins intéressante ! Bon dimanche et belle semaine à venir !
Grosses bises♥
Ah le formica, une matière qui remonte à mon enfance... merci Luciole, bon dimanche à venir, jill
J'ai continué ma lecture avec plaisir. BisousSuivre le flux RSS des commentaires
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Bonjour Luciole, contente de voir que tu as poursuivi ton roman. Je ne m'attarde pas et file à la suite.